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Paul Goldman, éditeur

Comment fonctionne la mémoire de travail ?

Dernière mise à jour : 21 nov.

Une étude de Mayo Clinic menée en 2011 sur un panel de 1321 adultes de plus de 70 ans a montré que ceux qui pratiquaient des activités manuelles, comme le tricot, avaient moins de risque de développer des déficiences cognitives légères et des pertes de mémoire.


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La mémoire de travail est un système cognitif complexe qui permet de maintenir et de manipuler temporairement l’information nécessaire à la réalisation de tâches cognitives diverses, telles que la compréhension, la prise de décision, le raisonnement et la résolution de problèmes. Contrairement à la mémoire à long terme, qui conserve les informations de manière durable, la mémoire de travail est limitée en capacité et temporellement transitoire. Pour comprendre comment la mémoire de travail se construit, il est utile d’explorer ses différentes composantes, les processus cognitifs sous-jacents, et les réseaux neuronaux qui la supportent.

 

Voici une explication scientifique détaillée de ce qu’est la mémoire de travail, illustrée par des exemples de son application.

 

Composantes de la mémoire de travail

 

Selon le modèle théorique le plus influent, proposé par Baddeley et Hitch (1974), la mémoire de travail est composée de trois sous-systèmes principaux :

 

-       L’administrateur central : Il s’agit d’un système de contrôle attentionnel qui gère les ressources cognitives, dirige l’attention vers les informations pertinentes et inhibe les distractions. Il coordonne les deux sous-systèmes subsidiaires.

 

-       La boucle phonologique : Elle est responsable du maintien et de la manipulation des informations verbales et auditives. Elle comprend un stockage à court terme pour les sons et un mécanisme de répétition subvocale qui rafraîchit ces informations.

 

-       Le calepin visuo-spatial : Ce système traite les informations visuelles et spatiales, permettant de conserver et de manipuler les images mentales et les positions dans l’espace.

 

Une quatrième composante, appelé « buffer épisodique », a plus tard été ajouté au modèle par Baddeley. Ce système intégratif combine les informations issues de la boucle phonologique, du calepin visuo-spatial et de la mémoire à long terme en représentations multimodales cohérentes.

 

Construction de la mémoire de travail

 

Quatre étapes permettent de décrire comment se construit et fonctionne la mémoire de travail :

 

1)    L’encodage de l’information

 

La première étape consiste à encoder les informations entrantes. Lorsqu’une information est perçue par les sens, elle est d’abord traitée par les systèmes sensoriels, puis transférée dans la mémoire de travail pour être utilisée dans des tâches cognitives immédiates. Par exemple, lorsqu’on écoute une conversation, les sons sont traités par les aires auditives primaires, puis les informations verbales sont envoyées à la boucle phonologique pour y être stockées temporairement.

 

L’encodage implique aussi des mécanismes d’attention contrôlés par l’administrateur central, qui sélectionne les informations les plus pertinentes. Dans un contexte multitâche, comme lire un document tout en écoutant de la musique, l’administrateur central détermine quelles informations doivent être priorisées pour éviter la surcharge cognitive.

 

2)    Le maintien de l’information

 

La deuxième étape permet de maintenir l’information disponible dans la mémoire de travail pendant une courte période (quelques secondes à une minute). Pour que l’information soit maintenue, elle doit souvent être rafraîchie activement, par exemple à travers la répétition subvocale pour la boucle phonologique. Lorsque nous essayons de retenir un numéro de téléphone jusqu’à ce que nous puissions le composer, nous utilisons la répétition subvocale pour rafraîchir cette information.

 

Dans le calepin visuo-spatial, le maintien de l’information visuelle est réalisé par des circuits neuronaux bien précis dans les cortex pariétal et occipital. Par exemple, lorsqu’on essaie de se souvenir de l’agencement des meubles dans une pièce pour planifier un déplacement, le calepin visuo-spatial maintient cette représentation mentale.

 

3)    La manipulation de l’information

 

La troisième étape est celle où l’information maintenue dans la mémoire de travail est manipulée, c’est-à-dire transformée ou réorganisée. Ce processus implique souvent l’administrateur central, qui orchestre les opérations sur les informations. Par exemple, lorsqu’une personne effectue un calcul mental complexe comme 53 + 28, elle doit maintenir les chiffres en mémoire tout en effectuant les étapes successives du calcul. Le cerveau décompose alors l’opération en étapes plus simples, telles que l’addition des dizaines et des unités, avant de combiner les résultats.

 

4)    La récupération de l’information

 

La dernière étape permet de récupérer l’information. Cette récupération se produit lorsque l’information maintenue dans la mémoire de travail est soit transférée dans la mémoire à long terme, soit utilisée pour effectuer une tâche immédiate. Par exemple, après avoir résolu un problème mathématique en utilisant la mémoire de travail, la réponse peut être conservée dans la mémoire à long terme si elle est pertinente pour un apprentissage futur. Les régions frontales du cerveau, notamment le cortex préfrontal, jouent un rôle clé dans la récupération des informations de la mémoire de travail.

 

Bases neurobiologiques de la mémoire de travail

 

La mémoire de travail repose sur un réseau de régions cérébrales interconnectées, principalement situées dans le cortex préfrontal, le cortex pariétal et les aires sensorielles associatives :

 

-       Le cortex préfrontal : Cette région joue un rôle central dans le contrôle exécutif et l’allocation des ressources attentionnelles. Il est responsable de la gestion de l’administrateur central et de la manipulation des informations dans la mémoire de travail.

 

-       Le cortex pariétal : Il est impliqué dans la gestion des informations spatiales et visuelles, jouant un rôle dans le fonctionnement du calepin visuo-spatial.

 

-       Les régions temporales : Elles sont associées au traitement des informations verbales, comme le stockage à court terme des sons dans la boucle phonologique.

 

-       Les ganglions de la base et le cervelet : Ils interviennent dans le contrôle de la répétition subvocale et la coordination des mouvements mentaux lors de la manipulation d’informations.

 

Les études en neuro-imagerie ont montré que la mémoire de travail active un réseau étendu de régions cérébrales, indiquant que sa construction repose sur une interaction dynamique entre les différentes aires du cerveau.

 

 

Applications concrètes de la mémoire de travail

 

La mémoire de travail a des applications concrètes multiples, puisqu’elle permet d’accomplir des tâches cognitives diverses. Elle est sollicitée notamment dans les domaines suivants :

 

La mémoire de travail en mathématiques

 

Les tâches mathématiques nécessitent souvent l’utilisation de la mémoire de travail pour stocker temporairement les informations et effectuer des manipulations. Par exemple, résoudre un problème tel que 456 - 78 implique de maintenir les chiffres en mémoire tout en exécutant des opérations séquentielles (soustraction des unités, puis des dizaines). La boucle phonologique peut être utilisée pour répéter les chiffres, tandis que le calepin visuo-spatial aide à visualiser les étapes du calcul.


La mémoire de travail dans la compréhension de textes

 

Lorsqu’on lit un texte, il est nécessaire de maintenir des informations en mémoire pour établir des liens entre les phrases et comprendre le sens global. La mémoire de travail permet de se rappeler les idées clés d’une phrase tout en intégrant les informations des phrases suivantes. Si la mémoire de travail est insuffisante, la compréhension sera fragmentée, car les connexions entre les informations ne pourront pas être établies efficacement.

 

La mémoire de travail dans les tâches de navigation spatiale

 

La navigation dans un environnement complexe, comme trouver son chemin dans un bâtiment, fait appel au calepin visuo-spatial de la mémoire de travail. Les informations sur l’agencement des pièces et des corridors doivent être maintenues en mémoire pendant que l’on se déplace pour ne pas perdre son orientation. Les cartes mentales sont des exemples de la façon dont le calepin visuo-spatial stocke et manipule les représentations spatiales.

 

La mémoire de travail et le contrôle des émotions

 

Le contrôle émotionnel nécessite également l’utilisation de la mémoire de travail. Par exemple, lorsqu’une personne doit faire un discours en public, elle peut ressentir de l’anxiété. La mémoire de travail est utilisée pour inhiber les pensées négatives et se concentrer sur le contenu du discours, en utilisant des techniques de répétition mentale pour maintenir un état de calme. L’administrateur central joue un rôle clé dans la régulation des émotions en gérant les ressources attentionnelles pour minimiser l’impact des distractions émotionnelles.

 

Limites de la mémoire de travail

 

La mémoire de travail a une capacité limitée, généralement estimée à environ 4 à 7 éléments. Cette limitation implique que, lorsque les tâches sont trop complexes ou que trop d’informations doivent être maintenues simultanément, la performance peut décliner. Cette limitation peut être compensée par des stratégies comme le « groupement » d’informations, où les éléments individuels sont regroupés en unités plus significatives. Par exemple, pour retenir une longue suite de chiffres (comme « 1-9-8-7 »), on peut les regrouper en paquets plus petits (dans ce cas-ci « 1987 »).

 

Conclusion

 

La mémoire de travail est un élément fondamental des fonctions cognitives qui permet de traiter, de manipuler et de maintenir les informations nécessaires à l’accomplissement de tâches cognitives complexes. Elle repose sur l’interaction de plusieurs composantes (administrateur central, boucle phonologique, calepin visuo-spatial) et d’un réseau neuronal complexe. Les applications de la mémoire de travail s’étendent aux mathématiques, à la compréhension de textes, à la navigation spatiale et même au contrôle des émotions, démontrant son importance pour atteindre des objectifs variés.

 

En comprenant comment fonctionne la mémoire de travail et en adoptant des stratégies pour l’optimiser, il est possible de maximiser ses capacités cognitives et d’améliorer ses performances dans divers aspects de sa vie.




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