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Savez-vous gérer vos attentes et celles des autres?

Dernière mise à jour : 28 mars 2023

« Les meilleures choses dans la vie sont inattendues parce que nous n’avions aucune attente. » Eli Khamarov



Nous avons tous des attentes, que ce soit envers nous-mêmes, les autres, des objets de consommation ou encore des situations. Lorsque ces attentes ne sont pas comblées, il est possible d’éprouver de la déception, de la tristesse, voire du découragement. Comprendre les facteurs qui influent sur notre façon de gérer nos attentes et celles des autres est une étape importante afin de nous libérer de ces émotions négatives.


Faut-il croire en la pensée magique ?


Lorsque nous avons des attentes, nous voulons qu’elles se réalisent ! Cependant, s’attendre simplement à ce que quelque chose se produise ne suffit pas à ce que notre souhait se concrétise.


Jean Piaget, psychologue émérite du développement de l’enfant, a noté que les jeunes enfants ont du mal à distinguer le monde subjectif qu’ils élaborent dans leur tête et le monde objectif extérieur. Selon ses observations, les enfants croient donc parfois que leurs pensées peuvent causer directement des événements (p. ex. avoir des pensées de colère à propos de son petit frère peut le faire tomber dans l’escalier). Piaget parle à ce propos de « pensée magique » et affirme que nous devrions tous avoir dépassé ce type de pensée vers l’âge de 7 ans.


Or, il s’avère que beaucoup d’adultes normaux continuent à s’engager dans diverses formes de pensée magique. La prière, notamment, peut être considérée comme une manière d’appeler à la réalisation d’une attente sans que cela requière d’actions concrètes de la part de l’individu. Ce n’est évidemment pas une façon de gérer ses attentes, puisque cela déresponsabilise totalement la personne.

Comment les attentes se construisent-elles ?


Pour saisir quel rôle nous pouvons jouer dans la gestion de nos attentes, il faut savoir que celles-ci se forment progressivement dans l’esprit de chacun selon le processus suivant : les attentes sont élaborées à partir d’hypothèses qui se basent sur ce que nous pensons être notre volonté ou celle des autres, en fonction de l’éducation que nous avons reçue ou d’une conception idéalisée du monde. Bien souvent, ces attentes s’éloignent de la réalité pour nous laisser en proie à la frustration.


À cet égard, l’image que nous projetons de nous-mêmes est déjà chargée des attentes des autres : elle tente de répondre à celles de nos parents, de notre famille, de nos professeurs, de nos amis, de notre partenaire de vie, de nos collègues, etc. Il va sans dire que cela peut être une source de souffrance lorsque le désir même de se conformer à ces attentes est en décalage avec nos propres aspirations.


En ce sens, il importe de réfléchir aux répercussions que peuvent avoir ces attentes sur nous et sur les autres.


Attentes envers soi-même


Les attentes que nous avons envers nous-mêmes concernent autant la manière dont nous devrions nous comporter que ce à quoi nous devrions aspirer. Ces attentes influencent fortement nos relations avec les autres de même que l’image que nous avons de nous.

Mais ces attentes sont-elles réalistes ? Est-ce qu’elles nous mènent à nous améliorer et à nous dépasser, ou à nous mettre de la pression et à nourrir une mauvaise image de soi ? Si ces attentes suscitent des émotions négatives en nous, il est impératif de les redéfinir afin qu’elles servent à nous propulser au lieu de nous emprisonner.


Attentes envers les autres


Si nous avons beaucoup d’attentes envers les autres, nous courons le risque d’être frustré(e)s et déçu(e)s. D’une part, les attentes implicites sont presque assurées de ne pas être satisfaites ; d’autre part, il est irréaliste de penser que la simple communication de nos attentes incitera les gens à se comporter comme nous le souhaitons. C’est pourquoi il est important de limiter nos attentes envers les autres.


Pour ce faire, nous pouvons nous poser les questions suivantes : est-ce que nos attentes sont susceptibles de se réaliser ? Les avons-nous bien communiquées aux personnes concernées ? Celles-ci perçoivent-elles positivement ces attentes à leur égard, ou considèrent-elles que leur stress et leur sentiment d’inadéquation s’en trouvent augmentés ? Dans un tel cas, il importe de redéfinir nos attentes afin qu’elles deviennent pour notre entourage une source de motivation plutôt que de dévalorisation.



Un modèle explicatif de la gestion des attentes


Afin d’illustrer la dynamique des interactions entre des individus ayant à gérer les attentes relatives à un rôle, Katz et Kahn ont produit le modèle suivant :




Ce modèle se résume comme suit : l’individu A ( émetteur ) a une attente envers son interlocuteur B (personne focale). Par exemple, A souhaite que B soit ponctuel. Si B est ponctuel, il répond à l’attente de A et la relation sera satisfaisante.


En revanche, si B ne satisfait pas cette attente, A ressentira une tension, un inconfort.


L’individu A a la responsabilité de gérer cet inconfort. Il doit donc communiquer à B qu’il s’attend à ce qu’il soit ponctuel (attente signifiée).


Si l’interlocuteur comprend et valorise cette attente et le signifie à A, la tension disparaîtra et un capital relationnel pourra se développer.


Pour résumer les implications de ce modèle, il est possible de recenser quatre types d’attentes pouvant exister par rapport au rôle qu’une personne est appelée à jouer :


· Des attentes contradictoires entre elles, ou opposées, bien qu’elles aient été formulées à l’égard d’un même rôle.

· Des attentes en conflit avec celles de la personne, ou allant à l’encontre des valeurs, besoins ou compétences de celle-ci.

· Des attentes ambiguës, mal définies ou mal communiquées.

· Des attentes excessives, ou ne respectant pas les capacités de la personne.



Liens avec le profil de personnalité


Selon le modèle présenté ci-dessus, la personnalité (facteurs personnels) influence la façon dont nous gérons nos attentes et nos rôles. L’interaction entre le trait de la conscience et celui de la stabilité émotionnelle nous fournit de précieux renseignements sur la gestion des attentes face à soi-même et des attentes d’autrui ainsi que sur le rapport à la performance.


Essentiellement, la dynamique relationnelle propre à la gestion des attentes peut s’établir entre quatre types de personnes.


La personne décontractée


Cette personne a peu d’attentes élevées face à elle-même. Elle ne recherche pas la réussite et cela ne l’inquiète pas. Elle n’a rien à prouver ni à soi-même ni aux autres. Elle gère bien l’incertitude. Elle prend la vie comme elle vient et a confiance que les choses iront pour le mieux.


Principales caractéristiques :

Peu consciencieuse et stable émotionnellement. N’a pas une grande volonté de réussir et gère bien ses émotions.


La personne désorganisée


Cette personne a tendance à ne pas planifier, à prendre les choses comme elles viennent et à être pessimiste face à l’avenir. Elle est susceptible d’éprouver un sentiment d’efficacité personnel faible. Elle a également tendance à éviter les situations de performance afin d’éviter l’échec et l’humiliation. Les responsabilités sont une source de stress importante pour elle. Elle a de la difficulté à gérer les attentes d’autrui et a tendance à prendre des décisions sous le coup de l’émotion.


Principales caractéristiques :

Peu consciencieuse et instable émotionnellement. N’a pas une grande volonté de réussir et a de la difficulté à gérer ses émotions.



La personne déterminée


Cette personne montre une bonne capacité à mettre de côté ses émotions négatives et à retarder la gratification pour se concentrer sur ses objectifs. Elle a des objectifs de réussite élevés tout en étant capable de gérer les difficultés. Ses moments de découragement sont courts et ne la font pas déroger de ses objectifs et de ce qui est planifié. Elle est capable de gérer la pression liée aux attentes de performance.


Principales caractéristiques :

Très consciencieuse et stable émotionnellement. Veut réussir et gère bien ses émotions.



La personne sujette à l’anxiété de performance


Cette personne peut se mettre beaucoup de pression pour atteindre des objectifs élevés. Les échecs et l’anticipation de l’échec provoquent chez elle une détresse importante. L’organisation et la planification rigides peuvent être un mécanisme qu’elle déploie pour gérer l’anxiété. Elle a malgré tout de la difficulté à gérer la pression et à performer, et risque l’épuisement professionnel.


Principales caractéristiques :

Très consciencieuse et instable émotionnellement. Veut réussir, mais a de la difficulté à gérer ses émotions.



Une saine gestion des attentes contribue-t-elle au bonheur ?


Apprendre à mieux gérer ses attentes et celles des autres nous fournit de précieux enseignements sur la façon dont nous pouvons sortir de la boucle infinie des déceptions face aux attentes non réalisées. On peut espérer ainsi parvenir à éprouver de la satisfaction face à soi-même et, ultimement, un sentiment de bien-être.


« Le plus grand obstacle à la vie est l’attente ; celui qui espère demain, néglige aujourd’hui. » Sénèque, philosophe grec


S’il est inévitable d’avoir et de susciter des attentes, il ne tient qu’à nous d’en faire une saine gestion. Pour voir plus clairement ce qui nous empêche d’être heureux, voici quelques actions à entreprendre et questions à se poser :


Différencier attentes, besoins et désirs


· Mon bonheur dépend-il uniquement de ma capacité à répondre aux attentes des autres ?

· M’arrive-t-il de chercher à répondre aux attentes des autres au détriment de la satisfaction de mes besoins ?

· Suis-je capable de prendre en compte mes propres désirs dans mes relations avec les autres ?


Identifier les obstacles à son autosuffisance


· Qu’est-ce qui m’empêche de combler moi-même mes besoins ?

· Est-ce que je désire que quelqu’un s’occupe de moi ?

· Si autrui réussit à satisfaire mes besoins ou mes attentes, est-ce que je considère cela comme une preuve d’amour ou est-ce que cela me fait sentir important(e) ?



Évaluer l’aspect réaliste des attentes


· Est-ce que mes attentes ont des chances d’être satisfaites ?

· En toute franchise, se peut-il que je m’attende à ce que les autres agissent comme je l’aurais fait en pareille situation ?

· Cette attente formulée à mon égard surestime-t-elle mes capacités ?

[1] Traduction libre de : « The best things in life are unexpected – because there were no expectations. »

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